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cecileb
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cecileb [Michel BUTOR]
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-====== Michel BUTOR ======+====== Michel BUTOR (1926-2016) ​======
  
 ''​Rédactrice principale : Nadia Fartas''​ ''​Rédactrice principale : Nadia Fartas''​
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 Parents catholiques pratiquants Parents catholiques pratiquants
 ==== - affiliations politiques :​ ==== ==== - affiliations politiques :​ ====
-Dans //​Curriculum vitae//, l’écrivain fait part de sa proximité avec les mouvements politiques et intellectuels à gauche et à l’extrême gauche (Parti communiste, mouvement trotskiste, marxisme, Lutte ouvrière, Socialisme et Barbarie) au milieu des années cinquante, tout en affirmant sa distance vis-à-vis de toute adhésion à un groupe ou à un parti, attitude qu’il a toujours conservée par la suite, préférant,​ s’il le fallait, la posture du « compagnon de route » à celle du « militant ». L’écrivain précise ainsi la manière dont il considère les relations entre littérature et politique :​ « […] à des périodes particulièrement tendues, je me suis engagé. Par exemple, j’ai signé le Manifeste des 121, contre la guerre d’Algérie. Il y a des moments où l’écrivain devient un traître s’il ne jette pas dans la balance l’autorité morale dont il se trouve investi. Cela dit, je n’aime guère les pétitions, les chartes ni les déclarations de ce genre. D’abord, parce que j’ai horreur de parapher des textes que je n’ai pas rédigés moi-même, textes dont la rhétorique me déplaît la plupart du temps. Et s’il m’arrive, pour la bonne cause, de m’engager malgré tout, je sais que la chose est souvent vaine : lorsque vous trouvez deux cents ou trois cents signatures au bas d’une revendication,​ elles se neutralisent les unes les autres et perdent leur efficacité. Si des journalistes veulent connaître mon avis sur tel ou tel sujet, ils peuvent venir m’interroger :​ je donne une réponse personnelle,​ avec ma sensibilité et mon propre langage. Le malheur de la politique, c’est que les mots qu’elle utilise sont totalement corrompus, au sens moral et linguistique :​ un écrivain ne saurait avaliser la langue de bois, et encore moins l’utiliser à son tour quand il prend parti. Mais c’est surtout en écrivant ses romans ou ses poèmes qu’il s’engage :​ le style n’est jamais neutre, jamais innocent, il peut cautionner l’ordre établi ou bien, au contraire, ne pas s’y conformer et le subvertir. Le vrai choix politique est là1. » +Dans //​Curriculum vitae//, l’écrivain fait part de sa proximité avec les mouvements politiques et intellectuels à gauche et à l’extrême gauche (Parti communiste, mouvement trotskiste, marxisme, Lutte ouvrière, Socialisme et Barbarie) au milieu des années cinquante, tout en affirmant sa distance vis-à-vis de toute adhésion à un groupe ou à un parti, attitude qu’il a toujours conservée par la suite, préférant,​ s’il le fallait, la posture du « compagnon de route » à celle du « militant ». L’écrivain précise ainsi la manière dont il considère les relations entre littérature et politique :​ « […] à des périodes particulièrement tendues, je me suis engagé. Par exemple, j’ai signé le Manifeste des 121, contre la guerre d’Algérie. Il y a des moments où l’écrivain devient un traître s’il ne jette pas dans la balance l’autorité morale dont il se trouve investi. Cela dit, je n’aime guère les pétitions, les chartes ni les déclarations de ce genre. D’abord, parce que j’ai horreur de parapher des textes que je n’ai pas rédigés moi-même, textes dont la rhétorique me déplaît la plupart du temps. Et s’il m’arrive, pour la bonne cause, de m’engager malgré tout, je sais que la chose est souvent vaine : lorsque vous trouvez deux cents ou trois cents signatures au bas d’une revendication,​ elles se neutralisent les unes les autres et perdent leur efficacité. Si des journalistes veulent connaître mon avis sur tel ou tel sujet, ils peuvent venir m’interroger :​ je donne une réponse personnelle,​ avec ma sensibilité et mon propre langage. Le malheur de la politique, c’est que les mots qu’elle utilise sont totalement corrompus, au sens moral et linguistique :​ un écrivain ne saurait avaliser la langue de bois, et encore moins l’utiliser à son tour quand il prend parti. Mais c’est surtout en écrivant ses romans ou ses poèmes qu’il s’engage :​ le style n’est jamais neutre, jamais innocent, il peut cautionner l’ordre établi ou bien, au contraire, ne pas s’y conformer et le subvertir. Le vrai choix politique est là ((Michel Butor, //​Curriculum vitae//, //​entretiens avec André Clavel//, Paris, Plon, 1996, p. 87.)). » 
  
  
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 === - thèse : === === - thèse : ===
    
-Après une première « thèse ​fantôme2 » ​intitulée « Les aspects de l’ambiguïté en littérature et l’idée de signification »,​ envisagée sous la direction de Jean Wahl, et à la suite d’autres projets de recherche, Michel Butor soutient une thèse sur travaux (« Répertoires ») le 7 février 1973, à l’université de Tours. Le jury est composé de Jean-Pierre Richard (rapporteur),​ Léon Cellier, Michel Raimond, Jean Starobinski et Jean Duvignaud (organisateur de la soutenance). Il obtient la mention Très honorable.+Après une première « thèse ​fantôme ((//​Ibid.//,​ p. 55.)) » ​intitulée « Les aspects de l’ambiguïté en littérature et l’idée de signification »,​ envisagée sous la direction de Jean Wahl, et à la suite d’autres projets de recherche, Michel Butor soutient une thèse sur travaux (« Répertoires ») le 7 février 1973, à l’université de Tours. Le jury est composé de Jean-Pierre Richard (rapporteur),​ Léon Cellier, Michel Raimond, Jean Starobinski et Jean Duvignaud (organisateur de la soutenance). Il obtient la mention Très honorable.
 === - postes occupés : === === - postes occupés : ===
    
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 ===== 4. Perspectives critiques et méthodologiques ===== ===== 4. Perspectives critiques et méthodologiques =====
  
-Michel Butor insiste sur l’importance de l’école de Genève dans son approche critique de la littérature : « Elle m’a beaucoup apporté. Ce que je découvrais,​ au contact de Georges Poulet, de Jean Starobinski ou de Jean Rousset, c’était une approche très subtile, très originale de la littérature. Cette approche, on pourrait la résumer en deux points. Premièrement,​ la primauté donnée au texte, c’est-à-dire la fidélité absolue. Deuxièmement,​ l’ouverture sur une culture aussi vaste que possible, sans aucun préjugé ni parti pris3. » L’écrivain définit ainsi en quoi consiste le travail de la critique : « La critique, pour moi, c’est de la littérature sur la littérature. Quand on aborde une œuvre, on ne doit pas l’étouffer sous l’érudition,​ on doit au contraire lui donner une nouvelle énergie. L’art de la critique est un art de catalyse : en ajoutant nos propres mots à une œuvre qu’on aime, on la change4. » L’écrivain souligne l’entremêlement de la littérature et de la vie : « L’œuvre littéraire résulte de l’existence et, en retour, l’existence est profondément bouleversée par elle. » Cette intrication Michel Butor la maintient et l’exploite notamment par les ressources de l’improvisation qu’il met au service de ses conférences et de son activité d’enseignement,​ qui lui fournit la matière de ses livres. À propos de ses cours, l’écrivain explique ainsi sa démarche :​ « J’avais préparé, évidemment,​ mais je ne lisais jamais de notes. J’arrivais avec le livre que j’allais commenter ;​ dans ce livre, j’avais glissé un certain nombre de petits signets, pour me guider. Un cours, pour moi, c’était toujours un voyage d’une citation à une autre. Des sortes d’escales5. » Les //​Improvisations //​sont issues des enregistrements de cours arrangés mais qui restent oralisés. La double activité d’écrivain et de professeur gouverne toute son œuvre. L’enseignement fut source d’autonomie :​ ces « revenus réguliers […] m’ont permis de rester indépendant comme écrivain, de ne pas faire de concessions. Je peux dire que mon métier de professeur a toujours garanti ma liberté d’écrivain.6 » Intitulée « Double vie, Double vue », sa dernière conférence en forme d’« autoportrait »,​ prononcée le mercredi 19 juin 1991, su traduire cette relation : « Double vie, parce que j’avais une double casquette, celle du professeur et celle de l’écrivain,​ l’une à Genève et l’autre en France. Ces deux domiciles m’aidaient à bien séparer mes deux visages. J’ai essayé de parler des inconvénients mais aussi des avantages de cette espèce de schizophrénie :​ elle me donnait une double vue, une sorte de stéréoscopie,​ le regard de l’écrivain étant enrichi par celui du professeur et le regard du professeur étant modifié par celui de l’écrivain7. »+Michel Butor insiste sur l’importance de l’école de Genève dans son approche critique de la littérature : « Elle m’a beaucoup apporté. Ce que je découvrais,​ au contact de Georges Poulet, de Jean Starobinski ou de Jean Rousset, c’était une approche très subtile, très originale de la littérature. Cette approche, on pourrait la résumer en deux points. Premièrement,​ la primauté donnée au texte, c’est-à-dire la fidélité absolue. Deuxièmement,​ l’ouverture sur une culture aussi vaste que possible, sans aucun préjugé ni parti pris ((//​Ibid.//,​ p. 90.)). » L’écrivain définit ainsi en quoi consiste le travail de la critique : « La critique, pour moi, c’est de la littérature sur la littérature. Quand on aborde une œuvre, on ne doit pas l’étouffer sous l’érudition,​ on doit au contraire lui donner une nouvelle énergie. L’art de la critique est un art de catalyse : en ajoutant nos propres mots à une œuvre qu’on aime, on la change ((//​Ibid.//,​ p. 122 et cit. suivante.)). » L’écrivain souligne l’entremêlement de la littérature et de la vie : « L’œuvre littéraire résulte de l’existence et, en retour, l’existence est profondément bouleversée par elle. » Cette intrication Michel Butor la maintient et l’exploite notamment par les ressources de l’improvisation qu’il met au service de ses conférences et de son activité d’enseignement,​ qui lui fournit la matière de ses livres. À propos de ses cours, l’écrivain explique ainsi sa démarche :​ « J’avais préparé, évidemment,​ mais je ne lisais jamais de notes. J’arrivais avec le livre que j’allais commenter ;​ dans ce livre, j’avais glissé un certain nombre de petits signets, pour me guider. Un cours, pour moi, c’était toujours un voyage d’une citation à une autre. Des sortes d’escales ((//​Ibid.//,​ p. 242.)). » Les //​Improvisations //​sont issues des enregistrements de cours arrangés mais qui restent oralisés. La double activité d’écrivain et de professeur gouverne toute son œuvre. L’enseignement fut source d’autonomie :​ ces « revenus réguliers […] m’ont permis de rester indépendant comme écrivain, de ne pas faire de concessions. Je peux dire que mon métier de professeur a toujours garanti ma liberté d’écrivain. ​((//​Ibid.//,​ p. 161.)) » ​Intitulée « Double vie, Double vue », sa dernière conférence en forme d’« autoportrait »,​ prononcée le mercredi 19 juin 1991, su traduire cette relation : « Double vie, parce que j’avais une double casquette, celle du professeur et celle de l’écrivain,​ l’une à Genève et l’autre en France. Ces deux domiciles m’aidaient à bien séparer mes deux visages. J’ai essayé de parler des inconvénients mais aussi des avantages de cette espèce de schizophrénie :​ elle me donnait une double vue, une sorte de stéréoscopie,​ le regard de l’écrivain étant enrichi par celui du professeur et le regard du professeur étant modifié par celui de l’écrivain ((//​Ibid.//,​ p. 252.)). »
  
  
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   * //​Entretiens. Quarante ans de vie littéraire 3. 1979-1996//,​ Nantes, Joseph K., 1999.    * //​Entretiens. Quarante ans de vie littéraire 3. 1979-1996//,​ Nantes, Joseph K., 1999. 
   * De la distance, //entretien avec Frédéric-Yves Jeannet//, Le Castor astral, 2000.   * De la distance, //entretien avec Frédéric-Yves Jeannet//, Le Castor astral, 2000.
-  * Entretiens pour France culture, « A voix nue », production Frédéric-Yves Jeannet, 2000 : +  * Entretiens pour France culture, « A voix nue », production Frédéric-Yves Jeannet, 2000 : https://​www.franceculture.fr/​dossiers/​michel-butor-lintegrale-en-cinq-entretiens-2000
-  * https://​www.franceculture.fr/​dossiers/​michel-butor-lintegrale-en-cinq-entretiens-2000+
   * //​Dictionnaire des écrivains contemporains de langue française :​ par eux-mêmes//,​ Jérôme Garcin (dir.), Éditions Mille et une nuits, 2004.   * //​Dictionnaire des écrivains contemporains de langue française :​ par eux-mêmes//,​ Jérôme Garcin (dir.), Éditions Mille et une nuits, 2004.
   * Conversation sur le temps, //entretien avec Carlo Ossola//, Paris, La Différence,​ 2012.   * Conversation sur le temps, //entretien avec Carlo Ossola//, Paris, La Différence,​ 2012.
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 === Autres ressources === === Autres ressources ===
  
-  * - Enregistrement audio des cours de Michel Butor à l’université de Genève : ​ +  * - Enregistrement audio des cours de Michel Butor à l’université de Genève : https://​mediaserver.unige.ch/​search/?​q=Michel+Butor
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