Né à Tlemcen en Algérie le 19 septembre 1909, Paul Bénichou est le fils de Samuel Bénichou et de Rachel Sarfati, descendante de juifs expulsés d’Espagne. La musique et la langue judéo-espagnole font partie du patrimoine culturel transmis à Paul Bénichou dans son enfance, de même que l’éducation religieuse. En 1914 la famille Bénichou s’installe à Oran, où Samuel Bénichou fonde avec son cousin un commerce de tissus. Après des études secondaires couronnées par un prix de concours général en thème latin, Paul Bénichou passe son baccalauréat à 15 ans et est envoyé comme interne au lycée Louis-Le-Grand à Paris en 1924. Après deux ans de classes préparatoires il intègre l’École normale supérieure. En 1930 il est agrégé de lettres. L’année précédente, il a épousé l’avocate et écrivain Gina Labin, avec laquelle il a une fille, Sylvia (épouse de Jacques Roubaud), en 1935. Ami avec les surréalistes, il fréquente aussi Merleau-Ponty, Simone Weil et Jacques Lacan. Il fréquente l’extrême-gauche antistalinienne, signe plusieurs manifestes antifascistes et, avec sa femme, s’engage en faveur du pacifisme. Il est favorable à la République espagnole. Mobilisé en 1939, il se réfugie, après l’armistice de juin 1940, à Bergerac où il achève Morales du Grand Siècle, puis à Lyon. Les mesures antisémites prises par le régime de Vichy dès octobre 1940 lui interdisent d’exercer son métier d’enseignant ; en tant que juif d'Algérie, il perd également la nationalité française et se voit renvoyé au statut colonial d’ « indigène israélite d’Algérie ». Il donne alors des cours particuliers avant de quitter la France en 1942 pour l’Argentine, dont il ne rentre qu’en 1949. S’étant progressivement éloigné du judaïsme en tant que foi, il s’engage contre l’antisémitisme (« Sur quelques sources françaises de l’antisémitisme moderne », Commentaire, 1978). Peu avant sa mort il se dit « Français d’intention et de droit, juif de filiation et de souvenir et libre-penseur de conviction ».
D’abord professeur de l’enseignement secondaire, il est successivement en poste à l’École alsacienne (1930-1934), au lycée de Beauvais (1934-1937) puis au lycée Janson-de-Sailly (1937-1939). Après sa révocation de l’enseignement secondaire il est invité à l’université de Mendoza en Argentine. Il occupe ensuite un poste à l'Institut français de Buenos Aires, alors dirigé par Roger Caillois et rallié à la France libre. Il y rencontre Jorge Luis Borges et travaille sur la littérature espagnole. La publication en 1948 de Morales du Grand Siècle lui assure une légitimité universitaire en France. Il y retourne en 1949 pour enseigner au lycée Condorcet à Paris (1949-1958), tout en étant attaché de recherches au CNRS. En 1959 il est invité à Harvard où il est professeur titulaire de littérature française jusqu’en 1979. Il partage alors son temps entre les États-Unis où il enseigne la littérature française classique et la poésie espagnole, et Paris où il poursuit ses recherches. Il est couronné par l'Académie française en 1978 pour Le Temps des prophètes. Doctrines de l'âge romantique (Prix Bordin) ; puis en 1988 pour Les Mages romantiques (Prix de l'Académie); et enfin en 1968 pour L'écrivain et ses travaux (Prix Émile Faguet).
XIXe siècle, XVIIe siècle, Moyen-âge et époque moderne en Espagne.
Il s’intéresse, dès Morales du Grand siècle, au lien entre les conditions socio-historiques et la production culturelle.
Victor Hugo, Lamartine, Vigny, Michelet, Ballanche, Sainte-Beuve, Nodier, Musset, Nerval, Gautier, Quinet.
Théâtre, Roman, Poésie, Romancero judéo-espagnol.
Romantisme français, Classicisme.
le peuple, l’écrivain-prophète, l’humanitarisme romantique, morales classiques.
Paul et Sylvia Bénichou, Jorge Luis Borges, Enquêtes. 1937-1952, Paris, Gallimard, 1957.